Entre Cordoue et Marrakech : un barzakh entre Ibn Rochd et Averroès

Cycle de conférences

Dans le cadre des activités de la Chaire UNESCO-EUROMED "Interculturalités méditerranéennes", le professeur Driss Ksikes, invité des "Mercredis de la philosophie" à l’Eco-campus, a tenu une conférence le 17 avril sur le thème "Entre Cordoue et Marrakech : Un barzakh entre Ibn Rochd et Averroès".

 
Écrivain, essayiste et dramaturge, M. Driss Ksikes est actif sur plusieurs fronts. Il est l'auteur de nombreux récits, essais et pièces de théâtre, et a reçu plusieurs distinctions, notamment le Prix du meilleur texte pour "Pas de mémoire, mémoire de pas" en 2000 et le Prix du meilleur texte pour "IL" en 2009. Il a été sélectionné également en tant que dramaturge arabe par Marseille Provence 2013 pour sa pièce "N’enterrez pas trop vite Big Brother" en 2012, et nominé pour le prix du meilleur dramaturge francophone (Maison des auteurs SACD) en 2019, entre autres.


À travers la lecture de deux extraits de son roman "Au détroit d’Averroès", le conférencier a abordé le sujet en associant la revitalisation de la pensée rationaliste d'Averroès et des dures adversités vécues par ce philosophe, à une réflexion qui permet de comprendre ce que cela induit au présent. Ce récit peut être définit comme étant un carrefour de la fiction et de la réalité, qui cherche à combler une faille, encore béante, entre l’Averroès adulé et l’Averroès contesté.


Le premier extrait récité de son livre a porté sur le moment de transfert, historiquement attesté, du cadavre et des manuscrits du philosophe Ibn Rochd de Marrakech à Cordoue. Le second, quant à lui, a porté sur la pensée d’Averroès sous un angle utopique ainsi que la représentation fictionnelle du détroit de Gibraltar.


En passant de Marrakech à Cordoue, il est impératif de passer par le détroit de Gibraltar, tel a été le transfert qu’ont subi les traces corporelles et spirituelles d’Ibn Rochd. Suite à quoi M. Ksikes a basculé lors de cette conférence de la fiction vers la terminologie, en s'attardant sur la notion du barzakh, via la métaphorisation du détroit, qu'il saisit pour interroger le parcours singulier du philosophe.  


Il a démontré avec clairvoyance comment Averroès s'est approprié de l’héritage d'Aristote pour à la fois le commenter, l'interpréter et en faire le fondement d'une pensée autre où rationalité et imagination sont intimement liées.  Ainsi, il créa la rupture tant par rapport à l'Occident que vis-à-vis de l'Orient. 


Latinisé et christianisé, Ibn Rochd a été oblitéré par le premier et renié par le second. Pour l'un et l'autre, il devient donc un étranger inquiétant. Or c'est à cause de cela même, de ces méprises cruelles, qu'il mérite aujourd'hui, nous dit Ksikes, d'être revisité et étudié. Parce qu'il reste intraitable par la théologie dogmatique et imprenable pour toute idéologie.


Cette rencontre a été un véritable détroit de la pensée, ouvrant la voie à de nombreuses réflexions. Un échange enrichissant et stimulant s'est développé avec l’auditoire, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de réflexion sur diverses notions de la philosophie et des sciences, suite à cette conférence.
 

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